Mme Royal annonce ses propositions contre la criminalité tout en se plaçant dans l'héritage de 1981 sur les libertés publiques

Publié le par désirs d'avenir à Pontault-Combault

Les candidats se saisissent des faits divers. Après Nicolas Sarkozy qui avait reçu, lors d'une réunion publique le 14 avril dans le Vaucluse, la mère de Ghofrane Haddaoui, une jeune femme lapidée en 2004 et dont les meurtriers viennent d'être condamnés, au tour de Ségolène Royal : en déplacement à Nantes, lundi 16 avril, la candidate a annoncé avoir contacté par téléphone la famille de Sophie Gravaud, 23 ans, retrouvée quelques jours auparavant étranglée tout près de la ville, et sans doute victime d'une agression sexuelle selon les premiers éléments de l'enquête.
Juste avant l'ouverture de son meeting au Zénith situé dans l'agglomération nantaise, Mme Royal a déclaré devant la presse qu'elle ferait, si elle est élue, de la lutte contre les violences et les crimes sexuels une "grande cause nationale".
"Un dispositif sera organisé autour de cinq mesures concrètes", a-t-elle expliqué : campagnes régulières de prévention, construction de prisons spécialisées, plus de libération de délinquants sexuels "si un comité d'experts ne garantit pas leur non-dangerosité", port de bracelet électronique après leur libération avec système de contrôle et de suivi, et gratuité des soins pour les victimes et leurs proches "aussi longtemps que nécessaire". Ces mots, la candidate les a répétés à l'issue d'un discours prononcé devant près de 9 000 personnes. "Ce combat sera mené sans merci, a-t-elle affirmé. Et quand j'entends certaines théories génétiques, je me dis qu'il y a bien deux visions."
 Restructuration du Conseil supérieur de la magistrature, qui ne sera plus présidé par le chef de l'Etat.
Réforme du mode de nomination des membres du Conseil constitutionnel.
Renforcement des moyens des organismes comme la Halde, la CNIL, la CNDS.
Réforme du mode de nomination au CSA, dont les membres seront désignés par le Parlement à une majorité des 3/5es.
Loi pour renforcer les sociétés des rédacteurs dans les rédactions, notamment avec droit d'opposition à la nomination du directeur de la rédaction.
Mesures anti-concentration dans le domaine de la presse quotidienne régionale.
 

Cet aparté sur l'actualité a conclu un "thème grave, sérieux" que Mme Royal avait choisi de mettre en avant lundi soir, sur la réforme des institutions et les libertés publiques (Le Monde du 16 avril), en présence du maire, Jean-Marc Ayrault, de Robert Badinter et, dans la salle, installé au premier rang, de l'ambassadeur des Etats-Unis, Craig Stapleton.
"Il n'y a pas de grand peuple sans exigence permanente de liberté", a lancé la candidate en promettant, sous sa présidence, "des libertés publiques renforcées et un Etat impartial". "Il y a beaucoup à faire", a-t-elle poursuivi, pour "faire entrer la France dans la modernité politique" et "mettre fin à un Etat monopolisé par un clan, les puissances d'argent et lobbies de tous ordres" - et même "ces notables qui veulent se mêler de tout".
Tout en confirmant son intention de renforcer les moyens des services de police et de justice, notamment pour lutter contre le terrorisme, Mme Royal a mis en garde sur la nécessité de "préserver la présomption d'innocence" et "les procès contradictoires".
"La première façon de résister au terrorisme et au fanatisme, a-t-elle déclaré, c'est de tenir bon sur les valeurs laïques et républicaines, de tenir bon sur le refus des lois d'exception."
A travers la sécurité, la lutte contre les discriminations, l'indépendance de la justice ou des médias, Mme Royal a cherché à montrer sa différence sur l'exercice du pouvoir par rapport à son rival de l'UMP, en s'adressant au "peuple français". "J'en fais ici le serment, le serment de Nantes : je resterai cette femme libre et solide, a-t-elle lancé, parce que c'est vous qui m'avez encouragée, qui m'avez faite (...) Je viendrai régulièrement vous rendre compte de ce pouvoir que vous m'avez déposé, et non pas donné." Un discours particulièrement apprécié de la salle qui a entonné, bien plus souvent que d'habitude, le couplet de la victoire : "On va gagner, on va gagner !"
Les libertés publiques, c'est aussi un thème qui avait marqué la campagne de 1981 de François Mitterrand et lundi soir, dans une ville où l'ancien président socialiste tint son dernier meeting avant sa victoire du 10 mai, les références ont été nombreuses. Invité de la soirée, Robert Badinter, qui a, sous les applaudissements nourris de la salle, dénoncé "la lepénisation de Nicolas Sarkozy", a en quelque sorte transmis le flambeau à "la nouvelle génération" incarnée par Mme Royal. "Mitterrand disait c'est au premier tour que se joue le second tour. Le premier tour, dimanche, c'est à nous !", a lancé l'ancien garde des sceaux, père de l'abolition de la peine de mort.
"C'est une alternance d'une aussi grande ampleur dont la France a besoin", a pour sa part souligné la candidate avant de s'exclamer en conclusion : "Vous voulez le changement, vous ne le regretterez pas car (...) la force tranquille, elle est là devant vous !". La "force tranquille", slogan fétiche de 1981.
Le Monde, NANTES ENVOYÉE SPÉCIALE, Isabelle Mandraud

Publié dans Déclarations

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